CONTEXTE
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BATIR DANS UN CONTEXTE :
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« Fuck the context » disaient-ils, par cynisme ou par utopie, pensant la ville de demain comme déconnectée de celle d’hier, du sol même si elle le pouvait. La ville dystopique du film « Blade Runner » et ces monuments urbains connectés par des voies aériennes, en dessous desquelles les piétons croupissent dans la pénombre et la fumée de la ville globale écrasante.
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Voilà ce que nous ne voulons pas …
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« Il faut nous reterrestrer, c’est-à -dire en l’occurrence que l’architecture, en se resituant, monte de la Terre non moins qu’elle descend des étoiles »1
Par cette assertion simple, Augustin Berque relocalise l’architecture dans son contexte, son milieu. Loin des théories du XXème siècle et de son modernisme universaliste (style international selon Hitchcock et Johnson), témoin d’une époque où l’on pensait résoudre les problématiques liées à l’architecture de manière globale, nous pensons que l’architecture s’inscrit avant tout dans un territoire dans lequel elle va créer des lieux : lieux de vie, lieux d’échange, des lieux en interaction avec un milieu existant : nature, ressources, énergie, construction sociale, mode de vie, mode constructif...
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Néanmoins les objets architecturaux parfois « tombés du ciel » mettant en valeur les prouesses techniques de leurs concepteurs restent une vitrine appréciée par le public mais ne doivent pas à notre sens, servir d’exemple pour la production architecturale dans son ensemble.
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On connait aujourd’hui les ravages urbains et sociaux du "chacun construit dans son coin" et du "zoning" (non mixité des espaces devenus de fait ségrégatifs, des « hétérotopies »2 selon Michel Foucault) , des ensembles sans liens entre eux, pensés sans la ville, sans le piéton, pour la voiture, sans soucis des milieux ni des ressources; du contexte en somme.
Des « non-lieux »
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Pourtant, dans les années 1980 dans son ouvrage « L'Architecture moderne. Une histoire critique. Editions Thames Hudson », en pleine illusion d’un monde global aux ressources sans limites et en croissance infinie. Kenneth Frampton théorisait après Alexander Tzonis et Liane Lefaivre ce qu’il nommera le « régionalisme critique » par opposition à la « civilisation mondiale » et au « Dirty Realism » : une forme de retour de certains architectes à la culture et à l’identité locale.
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Sans pour autant totalement tourner le dos à la modernité ni sombrer dans le pastiche néo-régionaliste qui mine nos périphéries urbaines, nous partageons en grande partie ces valeurs d’une architecture située et héritée d’un contexte préexistant.
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Les enjeux ont depuis changés et le monde a accéléré, la notion d’écoresponsabilité est aujourd’hui indissociable de notre profession autant que celle d’anthropocène : les ressources sont de plus en plus rares et les écosystèmes sont impactés ; nous nous devons d’en tenir compte en prenant notre part et des mesures adéquates.
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AH
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1. Augustin Berque Géographe extrait NUSSAUME, Yann. Milieu et Architecture. Edition Hermann. Paris, 2021.
2. FOUCAULT, Michel. Surveiller et punir. Editions Gallimard. Paris, 1975